Pas question de parité sur ce coup-là : quatre solides loustics occupent la scène du Pannonica ce mardi 30 janvier pour la première cuvée 2024 de The Bridge. Comme le veut le concept de ce réseau transatlantique pour le jazz et les musiques créatives, il y a deux Américains et deux Français : Mikel Patrick Avery, de Philadelphie, à la batterie et aux percussions et Hunter Diamond, de Chicago, au saxophone ténor et au sampler ; Yoram Rosilio, de la région parisienne, à la contrebasse et Florian Nastorg, de Toulouse et du collectif Freddy Morezon, (celui qui a eu une carte blanche à l’occasion des BIS au Pannonica une semaine auparavant, au saxophone baryton.)
Les musiciens qui se sont rencontrés deux semaines auparavant entament l’avant-dernier concert de leur tournée française de onze dates. Deux souffleurs et une rythmique, cela devrait envoyer ! À l’ancienne, un accompagnateur du projet introduit l’arrivée sur scène du groupe, nous informant d’une pause entre deux gigs d’une quarantaine de minutes.
Le premier set démarre en douceur. Batteur et contrebassiste tissent un tapis rythmique sur lequel le baryton vient installer ça et là des borborygmes saisissants. Avant de souffler des complaintes méditatives H. Diamond, via le sampler, insufflera à l’ensemble des sons ornementaux. La deuxième plage sera beaucoup plus dynamique et se terminera en avalanche sonore où chacun s’en donne à cœur joie. En deux longs fragments, les quatre musiciens nous ont montré deux facettes de leur savoir-faire et quittent momentanément la scène.
Armés de mugs remplis de thé ou d’infusion (les jazzmen sont emplis de sagesse de nos jours), nos quatre loustics reviennent. H. Diamond lance le sample d’un lock-groove (sillon sans fin d’un disque vinyle) pour lancer le nouveau morceau. S’en suivra une heure d’un set finalement bien rodé malgré le peu de temps que les gars ont eu à partager. Cette deuxième partie est plus intense, les gaziers se lâchent, même si la douceur y trouve encore une place avec un morceau à l’ambiance toute pastorale pour laquelle H. Diamond souffle dans le seul bec de son saxophone, produisant un son doux et éthéré.
Alors que le concert semble toucher à sa fin, Mikel Patrick Avery ne veut pas quitter la scène et entame un solo de batterie fiévreux. Les trois autres lurons prendront le relais.
Une soixantaine de spectateur·rice·s attablé·e·s autour des fameuses tables bleues de la salle, a osé la découverte de ce conglomérat éphémère. Ils et elles en ont eu pour leur argent : le quartet fonctionne et sa générosité est communicative. Comme j’ai pu l’entendre ce soir-là : « Un bon cru ce The Bridge ! »
Le quartet lors de son concert à Plages Magnétiques (Brest), le 18 janvier.
• John Doe
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