Soirée placée sous le signe du groove ce vendredi 5 avril 2025 à Paul Fort dans le cadre du festival Variations : Pannonica reçoit à l’étage le collectif anglais d’afro-jazz Nubiyan Twist pour l’une de ses trois dates en France. Euphorisant, mais un peu court…
La soirée promettait d’être festive, elle le fut. Courtement festive. Sept Anglais bon teint débarquent sur scène et dès le deuxième morceau, Jessica Aziza, la chanteuse gouailleuse du groupe invite le public à se lever de ces fauteuils beaucoup trop confortables, qui tendent parfois à transformer les concerts de la salle Paul Fort en délicieuses et paisibles siestes musicales. Les gens ne se font pas prier et descendent des travées. De mémoire de pannonisé, « on n’a jamais vu ça ! ». Une heure durant, le groupe va explorer les différents styles avec lesquels le jazz anglais s’est acoquiné ces dernières années : soulful, reggae, ragga, hip hop, afrobeat, broken beat… La chanteuse a un contact franc avec le public, l’invite ici à un pas de danse, là à reprendre ses paroles en chœur, raconte ce qui a inspiré ses textes (par exemple pourquoi il lui faut fuir les vélos bleus, après un traumatisme d’enfance lié à un cycle de cette couleur).
Derrière elle, le groupe est en place et, au cours du set, les six musicien·nes ont droit à leur moment. Johnny Enser, le trompettiste et Hannah Mae, la saxophoniste baryton, alternent les questions-réponses, prennent des solos qui ne s’éternisent pas. Le percussionniste, Jensen Santana, qui passe de temps en temps à la guitare (comme quoi un nom vous prédestine) et le batteur Finn Booth s’en donnent à cœur joie, mais sans démonstration inopportune : tout est au service d’un groove fédérateur.
Après cinquante-deux minutes d’un show grisant, les Anglais quittent la scène. Ils reviendront pour un rappel, mais le tout n’excédera pas une heure. On dit que pour être réussie une performance doit frustrer son public, mais après avoir mis littéralement le feu aux poudres et transformé le public en danseur·euses de l’émission Soul train (*2), le combo anglais a regagné les loges exiguës du Panno alors qu’il n’est pas encore 22h. Si leur groove est communicatif et euphorisant, ces jeunes gens sont un peu avares de leur talent : je les invite à visionner les concerts des grands anciens dont ils s’inspirent, feu Fela ou Maceo Parker. La communion musicale et le partage se font aussi sur la durée…
Prolonger sur le dancefloor, c’est la mission en sous-sol du deejay Bassline. Pour atteindre le bar, les spectateur·rices doivent sortir de l’enceinte de la salle et prendre les escaliers de la rue Basse Porte. Malheureusement la soirée est encore jeune et le temps d’une douceur presque estivale : ils·elles seront peu nombreux·ses à passer d’une salle à l’autre. Les absent·es ont (encore) eu tort et la musique du deejay Bassline, très appréciée par les trop peu nombreux·ses danseur·euses, n’a pas eu le retour qu’elle méritait. Ce n’est que partie remise. Le Panno est un club et le démon de la danse doit pouvoir y trouver toute sa place : « Say it loud ! ».
• John Do do do da da da…
*1 « Prêts à vous déhancher ?»
*2 Soul train : émission américaine de variétés créée par l’animateur et producteur Don Cornelius en 1970. L’émission présente principalement des artistes de soul et de rhythm and blues, qui se produisent sur le plateau entourés de danseurs (in Wikipedia).
CRÉDIT PHOTO © OLIVIER VOYER