EDITO
Qui ne s’est jamais dit : « bon, qu’est-ce que j’écoute ? » ? Une question teintée d’un certain découragement face à l’immensité de l’offre digitale et du refus net de s’y noyer. Alors comment faire ? Quelle porte ouvrir pour s’en sortir ? À cette énième question, nous répondrons donc : les labels !
Véritable cartographie de la création musicale actuelle, les labels disent une époque, un genre, un lieu, une manière de considérer la création. On les repère via un ou une artiste, on a entendu leur nom, vu le logo sur un disque… En quelques clics alors, on écoute comme on savoure. Quelle aubaine de trouver de bonnes directions artistiques qui effectuent le travail remarquable d’accompagner, mettre en valeur et rendre accessible celui d’artistes singuliers et singulières.
Face au catalogue, il faut savoir sélectionner tout de même, alors on choisit parce qu’on connait l’artiste, parce que le titre sonne bien, que la pochette est jolie, peu importe à vrai dire, cette décision est la vôtre. Et puis parfois, soudainement mais sans trop de hasard (car les bons labels font les bons produits), là, la claque !! Le plaisir intense d’entendre pour la première fois un morceau que d’emblée vous réécouterez mille autres. Il est là le coup d’éclat du label, le coup de génie de l’artiste et pour vous, le coup de foudre. De ces plateformes d’écoute en ligne, ça mérite de sortir alors, d’investir, de soutenir la cause, de rendre le plaisir concret et matériel, de célébrer la création musicale et d’honorer votre propre discothèque. On achète directement sur la page du label, chez un vendeur hongrois depuis Discogs ou son disquaire préféré. Le second plaisir est donc quand il est entre vos mains, surtout que, qui dit bon label, dit bel objet ! « Que faire de ce poster ? », « Mais quelle est donc cette couleur de microsillon qui luit sitôt à mes yeux ?! », « Oh, touche la pochette, c’est rigolo. ».
L’opération démarre alors : dépaqueter sans abîmer, glisser doucement le feuillet contenant le disque, le retirer délicatement, repérer la face A ou B, le poser sur la platine. S’assurer que l’ampli est allumé sur la bonne entrée. Soulever le bras. Entendre le battement du lecteur. Poser le bras au rebord. Écouter. Juste, écouter.
La boucle est bouclée. De votre errance initiale vous voilà heureux·se propriétaire d’un bijou musical roulant sous le saphir ! Comme les diamants, la musique est éternelle. Pensez à tout le chemin parcouru. Vous avez cherché, choisi, aimé, acquis, lancé ce disque. Au travers de cet objet il y a toute cette quête qui dit votre propre curiosité et audace mais aussi, l’indéniable qualité d’un label, celui qui vous guide dans cette aventure, à l’instar d’un véritable allié.
Comme dans toute scène de musiques actuelles, au Pannonica, les labels ont la part belle. (Voilà, il est fait le jeu de mot). Les labels ce sont une économie fragile et pourtant, un maillage riche et indispensable à la diffusion de ces musiques libres. Dernièrement nous avons reçu Kythibong, Carton Records, régulièrement Yolk vient faire ses sorties, International Anthem est fréquemment représenté, Rogue Art vient vendre ses disques, Komos nous ouvre son catalogue etc. Les directeur·rices artistiques, artistes ou non, sont des interlocuteur·rices hors-pairs, dont le regard reste une source d’inspiration. Bravo et merci à toutes ces forces vives qui font des musiques jazz et improvisées un territoire unique qu’on ne se lasse pas d’explorer et d’aimer.
Ce trimestre dans notre Pannorama vous trouverez We Jazz, Tinker Label, Yolk… Sur ce programme en interview, nous mettons à l’honneur les Allumés du Jazz avec la parole de Clémence Ferrand, disquaire de l’association de producteurs indépendants. Glissées ci-et-là, vous trouverez quelques pistes d’écoute, encore plus fleuriront sur notre site internet. Après leur concert, les artistes continueront de vous vendre et de vous dédicacer leur disque. À vous donc, on l’espère, les bonnes écoutes et belles découvertes, depuis chez vous, au Pannonica ou ailleurs.
Camille Retailleau
