Le poète et auteur guyanais est une des grandes figures du concept et du courant littéraire et politique de la Négritude.
On connait mieux ses deux compères : le sénégalais Léopold Sédar Senghor et le martiniquais Aimé Césaire qui ont semblé longtemps lui faire de l’ombre. Des trois il est pourtant le premier à publier un recueil de poèmes : « Pigments », paru en 1937.
Il a consacré sa vie à lutter contre l’assimilationniste et le colonialisme. Il mènera cette lutte à travers le monde entier et en grand partie aux Etats-Unis. Aussi bien en politique qu’en littérature Léon-Gontran Damas a porté haut et fort la parole d’une minorité, s’engageant à l’avènement d’une conscience noire. Le poète s’attaque aux étiquettes, défend les minorités, se révolte contre les mécanismes oppresseurs tenus par un monde blanc.
Au total Léon-Gontran Damas aura publié 6 recueils : « Pigments » (1937), « Poèmes Nègres sur des airs africains » (1948), « Graffiti » (1952), son favori : « Black-Label » (1956), « Névralgies » (1966), « Veillées noires », « Contes Nègres de Guyane » (1972).
Trop peu connu, longtemps ignoré, la parole et les mots de Léon-Gontran Damas ont notamment ressurgi en 2013 au travers du discours de Christine Taubira à l’Assemblée nationale au moment des débats sur le Mariage pour Tous.
© Marie Pétry (ainsi que pour la photo en couverture)
La formation éponyme reprend « PIGMENTS »,
son premier recueil de poèmes.
Au départ, il y a le choc d’entendre Nina Kibuanda dire Le Hoquet, un des plus célèbres poèmes de Léon-Gontran Damas. Marqué aussi par le discours de la garde des Sceaux en 2013, Guillaume Hazebrouck propose à Nina Kibuanda d’imaginer ensemble un répertoire pour mettre en musique ces textes puissants. L’alchimie s’opère entre les deux musiciens et à cette rencontre fortuite s’ajoute le bassiste Olivier Carole. Ensemble ils forment PIGMENTS.
Trois clarinettistes rejoignent ensuite la formation et forment alors le Clarinet Choir.
Une chorale comme un symbole pour illustrer la portée collective tant de ce projet que de l’écriture de Léon-Gontran Damas, capable de parler à toutes et tous, défendre et cultiver les différences, révéler la force du collectif. Tout en colère et en fougue, les textes sont aussi rendus et mis en valeur par le beatbox de Julien Stella. L’oralité est omniprésente. Le jazz souligne le cri de révolte, rend compte de la tension des mots, laisse place aux émotions, à la colère tout comme l’indignation. La musique s’installe donc sur des plans sonores ouverts, la rythmique tout en tension suit celles des textes et de la voix de Nina Kibuanda.
Par cette volonté de faire ensemble, le projet s’ancre aussi dans l’univers littéraire.
En collaboration avec Sika Fakambi, coordinatrice éditoriale du projet, le groupe a proposé à des auteurs et autrices d’aujourd’hui de répondre aux textes de Damas en une sorte de call & response.
Ainsi, la sortie du disque Léon-Gontran Damas’s Jazz Poetry sera accompagnée de celle d’un livret auquel de nombreuses plumes ont contribué. Il. s’agit de grands noms de la poésie contemporaine tels que : Sinzo Aanza, Jean D’Amérique, Catherine Blondeau, Julien Delmaire, Yancouba Diémé, Eva Doumbia, Lisette Lombé, Gaël Octavia, Raharimanana, Rodney Saint-Eloi, Seynabou Sonko et Lucie Taïeb.
Toutes et tous ont sélectionné des textes présents dans l’album et font le choix d’y répondre avec leurs mots et visions actuelles, qui toutefois épousent bien les formules de Léon-Gontran Damas.
Photo de la pochette : Nicola Lo Calzo
EN SAVOIR PLUS
Sur Léon-Gontran Damas
Jeune Afrique, « Négritude : Léon-Gontran Damas, le troisième homme », paru le 29 mars 2012.
France Culture, la pièce jointe, 13 décembre 2021, « Shine » : L’hommage de Léon-Gontran Damas à Louis Armstrong
3 minutes pour décrypter ce poème, saisir l’intention et le travail de Damas, mais aussi l’entendre.