George Xylouris (laouto, chant) et Jim White (batterie), étaient au Pannonica le 10 décembre pour un concert autour de leur dernier album The Forest In Me. Une nouvelle orientation pour le duo, née pendant le covid. On a alors pris le temps d’échanger avec eux sur leur processus créatif chez le disquaire Comme à la Radio.
Comment est né « The Forest In Me » ?
Jim White : En fait, nous avons commencé avant la pandémie. George était en Grèce, Guy Picciotto, (ndlr : leur producteur) en Amérique et moi aussi. On s’envoyait des trucs, on se répondait. Et puis la pandémie est arrivée et je me suis retrouvé coincé en Australie. Notre point fort jusque-là, c’était de jouer ensemble, dans une même pièce. Mais d’autres choses ont commencé à se produire. J’ai appris à enregistrer, ce que je n’avais jamais fait auparavant et nous avons essayé beaucoup de choses différentes. Nous avons commencé à jouer sur des visuels, chacun de notre côté, sans nous écouter l’un l’autre. On a rassemblé ça et Guy a fait le tri.
George Xylouris : Oui, j’étais en Crète, dans le petit studio que j’ai chez moi. Et j’enregistrais. C’était presque comme une conversation à distance. À propos de ce qui se passait à ce moment-là et de ce que nous ressentions. Jim et Guy Picciotto étaient en ville et moi à la campagne. Près des oliviers et des vignobles. Au bout d’un moment, dans ma petite pièce, j’ai eu l’impression que tous les sons frappaient les murs et tombaient par terre. Je ne pouvais pas sortir et jouer et j’avais le sentiment que les sons doux passaient à travers les murs, sous la porte. C’est pourquoi beaucoup de morceaux sont doux et harmonieux. J’aimais ces moments de calme.
Quelle a été l’inspiration pour cet album ?
Jim White : On connaît une réalisatrice anglaise qui vit en Australie et qui séjourne parfois à Athènes. “The Forest In Me”, c’est un de ses projets. Nous avons commencé à travailler avec ce titre, même s’il ne s’agissait pas d’une bande originale pour son film.
George Xylouris : Oui, ce titre m’a inspiré pendant cette période particulière de la pandémie. Presque tout le monde était seul dans sa chambre et essayait de gérer la situation. Cette période de calme m’a permis de voir les sons différemment. Cela m’a incité à découvrir d’autres choses de la forêt qui est en moi. J’ai essayé différents instruments. J’ai essayé d’associer les sons à des idées, à des sentiments, et donc les sons ont suscité des idées et nourri les échanges.
Jim White : Donc oui, nous y répondions. Et comme l’objectif n’était pas le concert, nous nous sommes débarrassés de beaucoup d’éléments. D’une certaine manière, c’est un album plus abstrait que les autres. George est un chanteur magnifique, mais au final, nous n’avons pas mis de mots sur l’album. La dynamique est différente des autres projets. C’est beaucoup plus subtil, beaucoup plus calme. Je pense que tout ce que nous avons appris va nous permettre de nous amuser lors du prochain enregistrement. Nous avons appris à laisser de côté beaucoup d’aspects qui nous semblaient intrinsèques à notre musique et je pense que c’est une très bonne évolution.
Il semble y avoir une touche d’improvisation dans l’album, est-ce que cela se reflète sur scène ?
Jim White : Quand nous avons commencé à jouer en live, les nouveaux morceaux ont affecté les anciens. Ils sont devenus plus dynamiques et plus concis. Les chansons se développent toujours au fur et à mesure que nous les jouons. Nous avons un titre, une idée, un sentiment et nous laissons la musique évoluer dans ce contexte. Les chansons se sont donc développées, elles se sont formalisées, se sont effondrées, puis se sont transformées à nouveau au bout d’un certain temps. Comme « Red Wine », qui devient parfois un peu forte, puis un peu plus insistante et parfois plus subtile. Mais ce n’est pas exactement de l’improvisation parce qu’un morceau reste un morceau.
George Xylouris : Et il n’y a pas de chant là-dedans, ce qui a beaucoup modifié nos concerts parce que nous avons beaucoup plus d’instruments maintenant.
Jim White : Mais quand le chant arrive, il est plus concentré. Et nous avons ajouté la lyre à nos concerts. Cela a changé énormément de choses au niveau de la dynamique. Nous avons toujours eu la liberté, ainsi que la discipline. Mais c’est peut-être plus subtil. Nous sommes plus mûrs. Nous essayons de conserver ce sentiment de calme.
George Xylouris : Les sons de The Forest In Me nous ont beaucoup aidés à prendre cette direction. Cela nous a permis de voir les choses différemment.
Jim White : Peut-être que nous savons maintenant que parfois, il ne faut pas se donner un mal de chien : on a peut-être atteint une certaine sérénité…
• Apollonia